Docteur Pierre NAHON

Chirurgien
Chirurgie Plastique, Reconstructrice et Esthétique


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Ce qu'on ne sait pas en chirurgie esthétique


Chirurgie esthétique : les histoires qu’on préfère cacher.

fragments d’histoires interdites

CHIRURGIE ESTHÉTIQUE : OPÉRATION « BÂILLON » Sophie Coignard

Parce qu’il dénonce les mauvaises pratiques médicales et les dérives commerciales qui sévissent dans le secteur où il exerce, celui de la chirurgie esthétique, le Dr Nahon est l’objet d’une campagne de pilonnage de la part de ses confrères. Récit.

Dès qu’un média aborde ce thème de façon critique ou sim­plement consumériste, les assignations pleuvent. De L’Événement du jeudi à 60 millions de consommateurs, de Que choisir au Point, plusieurs magazines ont dû répondre de leurs enquêtes déca­pantes devant les tribunaux, qui, d’ailleurs, ne leur ont pas tou­jours donné tort.

Mais le harcèlement principal ne s’adresse pas à la presse. Il vise les — très rares — « mauvais sujets » qui, au sein de cette pro­fession où nombre de généralistes se sont improvisés chirurgiens en un clin d’œil, gâchent l’ambiance parce qu’ils brisent l’omertà.

Pierre Nahon est chirurgien de formation. Ancien interne des hôpitaux de Paris, ancien chef de clinique, il est l’un des rares praticiens en chirurgie esthétique à avoir suivi un parcours uni­versitaire et hospitalier prestigieux. Parce qu’il a une assez haute image de sa compétence professionnelle, il ne s’est jamais impli­qué dans les syndicats et autres sociétés savantes qui réunissent une grande partie de la profession. Pour lui, beaucoup de ses confrères sont des semi-imposteurs, des généralistes, des stomatologues, des médecins ORL qui ont suivi une formation au débotté et n’ont pas les compétences nécessaires pour s’improvi­ser chirurgien. Cette opinion tranchée, le Dr Nahon n’hésite pas à la livrer dans les différents livres qu’il a publiés ni aux journa­listes qui le sollicitent.

Pour bien clarifier son propos, il assure que le chirurgien plas­tique a, contrairement à tous les autres spécialistes, non seule­ment une obligation de moyens mais une obligation de résultats. Ses patients viennent le consulter alors qu’ils ne sont pas malades, mais recherchent une amélioration de leur apparence physique. Il ne s’agit pas de les sauver ni même de les soigner, au sens strict du terme. Mais de les rendre dans un meilleur état que celui dans lequel on les a trouvés. Pierre Nahon s’engage donc par contrat à parvenir à un résultat précis, que décrit fort bien une simula­tion réalisée par ordinateur et annexée au contrat. Le document précise aussi la nature des risques liés à chaque intervention comme la loi l’y oblige.

Cette campagne menée par Pierre Nahon sur l’obligation de résultat s’accompagne bien entendu de critiques à l’égard de confrères. En ligne de mire, la fameuse Clinique du Rond-Point des Champs-Elysées (CRPCE), le plus gros établissement de France spécialisé dans ce domaine.

Montrée du doigt pour s’être livrée dans le passé à une publi­cité agressive, réprimandée par la Ddass (Direction départemen­tale de l’action sanitaire et sociale) et par la Dgccrf (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répres­sion des fraudes), la CRPCE s’est introduite en Bourse en 2001. L’étude financière qu’elle fournit pour son inscription au marché libre est donc censée montrer aux investisseurs éventuels tout le potentiel commercial de la clinique. Elle évoque donc un « réseau kinésithérapeutes » destiné à la fois à diffuser la gamme de pro­duits cosmétiques de la CRPCE et à « rabattre » de nouveaux clients. « Cent kinésithérapeutes travaillaient déjà en étroite rela­tion avec la CRPCE, précise l’étude. Ils ont généré sur une année, à titre de comparaison, 60 000 francs mensuels d’achats de pro­duits post-opératoires [...] et plus de 100000 francs mensuels d’actes chirurgicaux. »

Le même document précise que les chirurgiens sont des vaca­taires qui signent avec la clinique une convention visée par le conseil de l’ordre. « Les honoraires de médecins sont inclus dans le forfait proposé par la CRCPE et sont fixés d’un commun accord entre les praticiens et la société. Ils représentent en moyenne 15% du montant du forfait. »

Toutes ces pratiques n’avaient pas été expressément consignées par Hippocrate. Un jour, une dame qui s’est fait opérer à la Clinique du Rond-Point pour une augmentation mammaire décide de porter plainte contre l’établissement. Un expert est dési­gné par le tribunal. Dans son prérapport rendu le 11 octobre 2001, cet homme de l’art ne se montre pas très brutal à l’égard de la cli­nique, ni du chirurgien vacataire qui a réalisé l’intervention. « Oui, écrit-il, les actes et soins ont été attentifs, diligents et conformes aux données acquises de la science médicale, avec une réserve importante : c’est que la petite nécrose cutanée du sein gauche est vraisemblablement due à une maladresse chirurgicale, sans que l’on puisse l’affirmer ni le prouver » (voir document).
pre-rapport d'expertise en chirurgie esthétique
La dame, qui fait certes confiance à la justice de son pays, mais on ne sait jamais, demande au Dr Nahon une « argumentation contradictoire » au prérapport d’expertise, qui se montre plus sévère dans ses écrits du 31 octobre. Le rapport final d’expertise, rédigé le 18 décembre 2001, en tient-il compte ? Toujours est-il que son argumentation change. « NON, les actes et soins n’ont pas été attentifs, diligents et conformes aux données acquises de la science médicale [...]. La nécrose cutanée est directement en rap­port avec l’intervention, et vraisemblablement due à une mal­adresse chirurgicale. »
La patiente a gagné son procès. La clinique elle, a porté plainte contre le Dr Nahon pour diffamation, plainte qui a été jugée irrecevable.
la chirurgie esthetique, rapport d'expertise
Mais elle n’est pas seule à lui reprocher son manque d’esprit de camaraderie. C’est toute la profession, ou du moins ses ins­tances représentantes, le Syndicat national de chirurgie plastique reconstructrice et esthétique et la Société française des chirurgiens esthétiques plasticiens (Sofcep), qui le dénoncent auprès du conseil de l’ordre des médecins. Que lui reprochent ses confrères ? D’avoir laissé le magazine Que choisir reproduire, dans son édi­tion d’avril 2002, un contrat avec une de ses patientes dans lequel figure l’obligation de résultat. Lui reprochent-ils la publicité que lui fait, indirectement, la reproduction de son papier à en-tête ? Oui. Mais ce qu’ils ne supportent pas, c’est avant tout le contenu même du document, et cette fameuse référence à l’obligation de résultat. « Le docteur Nahon, tout en continuant à dénoncer de manière caricaturale les pratiques supposées de ses confrères, fait publier, sous prétexte d’exemple de bonne pratique, une repro­duction de son papier professionnel », s’insurge la Sofcep dans un courrier de plainte au conseil de l’ordre. Les instances dépar­tementales s’associent aux confrères mécontents du Dr Nahon et transmettent les différentes plaintes au conseil régional. « Dans différentes émissions télévisées, le Dr Nahon s’est permis de défendre la thèse d’une obligation de résultat, se plaint un chi­rurgien esthétique ». Le conseil transmet la plainte au conseil régional [...]. Il considère que les faits pourraient constituer des manquements à l’honneur, aux bonnes mœurs ou à la probité. » Rien que cela ! Un autre confrère de Grenoble écrit, lui, directe­ment au conseil national de l’ordre : « Lors de différentes émis­sions télévisées, le Dr Pierre Nahon s’est permis de défendre la thèse d’une obligation de résultat, ce qui est évidemment contraire au code de déontologie » , assure sans rire ce comique qui s’ignore.

Enfin, il n’y a pas vraiment de quoi rire. Car, à l’exception notable du professeur Jean Langlois, qui est alors président du conseil national de l’ordre des médecins et qui le défend avec courage et panache (« les reproches de non-confraternité qui sont adressés au Dr Pierre Nahon sont non seulement déplacés, mais dérangent certains qui cherchent peut-être à dissimuler la gravité de certains faits dont peuvent être victimes les patients », écrit-il dans un courrier daté du 25 juin 2003), à l’exception, donc, de l’ex-président du conseil de l’ordre, personne ne semble perce­voir ce qu’il y a d’insensé à vouloir sanctionner pour manque­ment à l’honneur et à la probité un médecin qui, certes, ne déteste pas passer à la télévision, mais qui propose aux patients des garanties supplémentaires et met le public en garde contre certaines dérives de ceux qui prétendent pratiquer la chirurgie esthétique.

Convoqué le 12 novembre 2003 devant le conseil régional, la représentante du conseil départemental de l’ordre des médecins demande que le Dr Nahon soit condamné à une sanction disci­plinaire pour avoir enfreint pas moins de cinq articles du code de déontologie.

Pour faire bonne mesure, l’assureur du Dr Nahon, qui a aussi sous contrat une bonne partie de la profession, a décidé de ne plus le compter parmi ses clients. Le 9 juillet 2002, il lui signi­fie, par courrier, la rupture de leurs relations contractuelles à compter du mois de novembre, date anniversaire du contrat d’as­surances. Quand le Dr Nahon demande des explications, l’assu­reur lui répond qu’il a omis de lui déclarer des « sinistres ». Quels sinistres ? Le Dr Nahon doit-il faire face à des plaintes de patients pour n’avoir pas respecté la fameuse obligation de résultat ? Pas du tout. Les « sinistres », ce sont les plaintes de confrères auprès du conseil de l’ordre ! Un an plus tard, le même assureur envoie une lettre circulaire aux nombreux confrères de Pierre Nahon qui font partie de sa clientèle. Il évoque les nouveaux risques juri­diques qui se profilent pour la profession et se montre rassurant : « La mise en place d’une défense musclée nous a permis depuis longtemps de négocier des contrats à juste prix... » La « défense musclée » prévoit, visiblement, de ne plus assurer celui qui brise l’omertà.