LES GRANDES QUESTIONS > Les patients > L’addiction à la chirurgie esthétique
Les patients qui abusent de la chirurgie esthétique, le font aussi à travers une relation particulière avec le ou les différents chirurgiens auxquels ils ont affaire. Peu d’entre eux refuseront de les opérer, et au lieu de les décourager de subir ces interventions répétitives, ils auront tendance, du moins pendant un certain temps, à favoriser cette frénésie opératoire. Quand plus un endroit n’a pas été façonné par le bistouri, le corps ne ressemble plus à rien. Le naturel a complètement disparu, pour faire place à un aspect flagrant de transformation chirurgicale.
La médecine esthétique - qui consiste principalement à injecter des substances dans les rides, contrairement à la chirurgie esthétique, joue par définition sur la répétition des actes, c’est son mode de fonctionnement. Cette réitération aboutit à une superposition de produits différents les uns sur les autres, sans discernement. L’engrenage des nouvelles injections est presque automatique, car il n’y a pas toute la logistique lourde d’une intervention chirurgicale. Les patients obnubilés traquent la ride de manière très précise, et cette découverte entraîne la répétition du geste.
Elles ne font, au bout d’un moment, qu’augmenter le volume sans effacer les rides. On découvre alors l’effet pervers de ce phénomène, qui non seulement ne corrige plus efficacement le défaut, mais transforme la physionomie. Les visages sont bouffis, figés, méconnaissables. Tout comme la multiplication des interventions chirurgicales aboutit à des corps transformés sans en améliorer la beauté et l’esthétique, la médecine esthétique répétitive peut défigurer.
Il n’en reste pas moins que les patients de chirurgie esthétique expriment souvent cette crainte d’être pris dans le piège de la surconsommation->109]. On entend souvent les patientes dire que si elles avaient l’argent, elles se feraient tout refaire. En réalité, il n’en est rien, la plupart ne font appel à la chirurgie esthétique que de manière ponctuelle . Rappelons aussi que l’échec chirurgical renforce la demande de réparation en chirurgie esthétique, et que l’insatisfaction laisse toujours, en quelque sorte, le patient en attente de mieux et prêt à recommencer.
Dans tous ces cas extrêmes, le chirurgien, avec l’aide de psychothérapeutes, se doit de faire comprendre à ce/ces patient(s) qu’un jour, il faut lâcher prise, renoncer et accepter de ne plus se faire opérer. Il ne suffit pas à un praticien, dans ces cas-là, de refuser de continuer d’opérer. Certes, il dégage ainsi sa responsabilité, mais le patient trouvera facilement un nouveau chirurgien esthétique. Il convient donc de l’orienter vers un psychothérapeute pour réglerce problème d’addiction à la chirurgie esthétique . Ce n’est qu’avec un travail sur soi, souvent long, que certains y parviennent. D’autres, malheureusement, refusent de considérer qu’ils relèvent de la psychothérapie, et persistent dans leur quête effrénée.